Indemnisation des passagers : A chacun son métier
3 mars 2025 François Teyssier Aucun commentaire Distribution Cour de Justice de l’Union Européenne, Damien Delarbe, France, indemnisation des passagers 2515 vues
J’ai lu dernièrement chez notre excellent confrère TourMaG un article ainsi libellé : « Retards, annulations de vols : cette agence de voyages récupère vos indemnités sans commission ! ». Titre aguicheur mais terriblement ambigu, à plusieurs titres.
Le premier, pour la petite histoire : Evasion – Artisan Voyagiste, un réseau de quatre points de vente en Drôme/Ardèche, dirigé par Damien Delarbe, prend-il également en charge les refus d’embarquement ?
Le second : cette récupération concerne-t-elle les clients d’Evasion ? Il semblerait que ce soit le cas.
Façon de parler, c’est un moindre mal, mais c’est quand même dangereux.
En effet, récupérer des indemnités prévues par le règlement n° CE 261/2004 sans être soi-même avocat ou société de recouvrement déclarée auprès du Procureur de la République est interdit, non seulement par ce règlement, mais aussi par la jurisprudence.
C’est donc une activité réglementée, un métier très particulier, qui implique de connaître un droit européen spécifique, appliqué dans le cadre d’une abondante jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
Cette activité est particulièrement chronophage, car les transporteurs aériens opposent une forte résistance pour éviter d’avoir à indemniser les passagers.
Ainsi, en exerçant cette activité, le responsable d’Evasion – Artisan Voyagiste est devenu « hors la loi » au sens littéral du terme. Car la loi précise :
« Le règlement communautaire désigne le “transporteur aérien effectif” comme débiteur exclusif des obligations d’assistance et d’indemnisation qu’il édicte, de sorte qu’il ne peut être invoqué à l’encontre de l’agence de voyages, quand seules les dispositions du code du tourisme ont vocation à régir la responsabilité de celle-ci à l’égard de son client en raison de l’inexécution ou de la mauvaise exécution des obligations résultant du contrat qui les lie. »
Plus simplement, la récupération des indemnités ne peut se faire qu’entre le passager et le transporteur aérien, ou par l’intermédiaire d’un avocat ou d’une société de recouvrement mandatée par le passager. C’est tout.
Cela signifie que si l’un des collaborateurs de l’agence, dédié à cette activité, commettait une erreur engageant la responsabilité civile professionnelle de l’agence en sa qualité de vendeur, on pourrait lui reprocher l’exercice illégal d’un métier ne faisant pas partie de son objet social.
Ce qui serait regrettable, d’autant plus que ce service n’est pas rémunéré.
De plus, lorsqu’il vend des forfaits touristiques, le vendeur est responsable de plein droit vis-à-vis de son client, avec une obligation de résultat. Cette situation crée une zone de risque entre deux activités qui ne sont pas conçues pour cohabiter.
Enfin, il me semble anormal qu’un chef d’entreprise puisse mettre en place un service, même – et surtout – à titre gracieux, et le faire savoir par voie de presse.
C’est potentiellement dangereux pour la pérennité de son entreprise.
Si j’osais, je dirais que cela frôle l’abus de bien social.
En résumé, avant de débuter une activité qui s’éloigne de son objet social, il est conseillé au dirigeant d’une entreprise de prendre le temps de comprendre les tenants et aboutissants des risques encourus par le service qu’il envisage de proposer à ses clients.
La bonne volonté ou l’altruisme ne sont pas des circonstances atténuantes dans ce cas précis.
François Teyssier
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