Bali, des portes de l’enfer au paradis des aventuriers


Je souhaite vous présenter les portraits d’agents de voyages de ma connaissance qui ont vécu des aventures extraordinaires. Souvent des personnalités remarquables. Parfois des simples témoins de faits qui les dépassant.

Je vous ai déjà parlé de mon ami Guy de Saint Cyr, «chasseur de lave» devant l’éternel. Créateur avec son épouse Monique de l’agence Aventure et Volcans. Tout est dit dans l’enseigne. Je vais vous raconter deux épisodes concomitants de sa vie aventureuse.

Ma façon à moi d’illustrer ce que certains appellent «la baraka» – la destinée…

Le 31 juillet 2003, Guy de Saint Cyr effectuait un voyage de repérage en Nouvelle Zélande. Pour mettre au point un circuit destiné à faire découvrir les volcans actifs de pays à ses clients.

Consciencieux, et par pure curiosité, il est parti visiter le parc de Hells Gate (les portes de l’enfer) situé à proximité de Rotorua. Un nom prédestiné qui est en réalité un parc touristique assez fréquenté. Pas vraiment sa quête.

Arrivé peu avant la fermeture, le lieu était quasiment désert. Suivant un chemin parfaitement balisé, il découvrit des petits cratères d’une petite dizaine de mètres de hauteur qui crachotaient de la boue. C’est donc en toute décontraction, qu’il a escaladé le gros cône de l’un d’entre eux qui projetait des giclées de boues visqueuses.

Arrivé au terme de son escalade, le sol se déroba sous ses pas et sa jambe s’enfonça jusqu’au mollet dans une boue fluide à 160°c. Douleur fulgurante, inhumaine. Dans un réflexe de survie, il parvient à extraire sa jambe et à rouler jusqu’au pied du minuscule volcan.

Seul et choqué, il enleva ses chaussures brûlées, son pantalon pour découvrir que la peau de sa jambe brulée avait glissée en accordéon sur ses chevilles. C’est donc en slip, choqué grelottant et gravement brûlé qu’une visiteuse le retrouva au bout d’un moment indéterminé. Il fut rapidement pris en charge jusqu’à l’hôpital de Rotorua puis  transféré à celui d’Hamilton.

Le verdict tomba rapidement : brûlures multiples au 3e degré. Greffé, il ne savait plus s’il pourrait remarcher correctement un jour. Son monde était en train de s’effondrer.

Pugnace, au terme d’une longue et difficile rééducation avec comme seul objectif de marcher toujours un peu plus loin, un peu plus haut, un peu plus longtemps qu’il fit le pari avec lui-même de remonter sur « ses » volcans. Il s’était fixé l’objectif de faire l’ascension de l’un des plus difficiles d’entre-deux, le Semeru situé sur l’île de Java qui culmine à 3 730 mètres d’altitude.

Un « volcan gris » explosif, dangereux. Un but à atteindre pour Guy. Pour lui, le signe annonciateur de son total rétablissement.

Comme il ne pouvait porter aucune chaussure, il s’était fait fabriquer localement une « sandale d’escalade. » Une épaisse semelle doublée une grosse couche de mousse et des lanières réglables. C’est donc ainsi équipé qu’il quitta son hôtel de base où il séjournait traditionnellement : le White Rose à Kuta sur l’île paradisiaque de Bali.

En quittant l’hôtel, il laissa son passeport à la réception et confirma son séjour les trois nuits suivantes. Pour parer à un éventuel échec ou au renoncement de son difficile projet.

Sur le terrain, il fut rapidement distancé par ses compagnons. Ce fut pour lui un véritable enfer avec l’espoir d’atteindre ce qui était pour lui le paradis.

Heureusement, il connaissait parfaitement les lieux. C’est donc seul, fatigué mais heureux qu’il escalada difficilement le volcan pour arriver au petit matin au cône final. C’était le 12 octobre 2002.

Rassuré, mais, c’est taraudé par un vague pressentiment qu’il ne pouvait expliquer qu’il regagna son hôtel à Bali.

C’est alors qu’il découvrit les pans du mur noircis de l’établissement totalement pulvérisé. Un paysage de guerre et de désolation. Toute la rue Legian street avait été totalement soufflée par un triple attentat terroriste qui fit 202 morts et 209 blessés. Un attentat terroriste attribué à des militants islamistes de la filiale locale d’Al-Qaïda.

Fataliste, Guy de Saint Cyr croit plus que jamais à sa bonne étoile. Car logiquement et compte tenu de son état physique, il devait se reposer à l’hôtel en attendant le retour de ses compagnons de voyage. Il est persuadé que c’est sa détermination et sa passion qui l’ont sauvé d’une mort certaine.

François Teyssier





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