Cent milliards pour le nouvel acteur du transport aérien dans le Golfe
28 janvier 2025 Jean-Louis Baroux 1 commentaire À la une Air Arabia, Arabie Saoudite, Fly Dubaï, Mohammed ben Salmane 3296 vues
100 milliards de dollars, c’est la somme pharamineuse que le gouvernement d’Arabie Saoudite a mis sur la table pour développer son transport aérien. Pour donner un ordre d’idée cela correspond à près de quatre fois le chiffre d’affaires d’Air France / KLM et deux fois celui du Groupe Lufthansa.
L’annonce date de juin 2024 et elle a été réitérée lors du dernier World Economic Forum de Davos dans le pavillon de l’Arabie Saoudite par le GACA (General Authority of Civil Aviation).
A quoi va servir cette manne ? Elle consiste aux dires du responsable de la stratégie du GACA Mohammed Alkhutaisi à tripler le nombre de passagers, développer le nombre de destinations desservies pour atteindre 250 et traiter 4,5 millions de tonnes de cargo.
Pour ce faire 50 milliards de dollars seront consacrés à l’infrastructure aéroportuaire, en portant, entre autres, à 6 le nombre de pistes de l’aéroport King Salman de Riyadh. 40 milliards serviront à l’acquisition de nouveaux appareils, à 100 millions de dollars le prix moyen d’un avion, cela correspond tout de même à 400 unités.
Les 10 derniers milliards seront utilisés pour créer une infrastructure pour la logistique et la maintenance ? Le tout à échéance 2030 si on en croit le plan dévoilé en juin 2024 et confirmé à Davos.
Voilà qui va sérieusement secouer le transport aérien du Golfe.
Celui-ci se partage actuellement entre Emirates Airlines et Qatar Airways avec d’autres transporteurs non négligeables tels qu’Etihad Airways qui se remet de ses errements stratégiques passés, Gulf Air qui recommence à pointer son nez, Kuwait Airways et Oman Air, sans compter le transporteur saoudien Saudi Arabian Airlines et le « low cost » Air Arabia.
L’arrivée d’un nouveau transporteur largement supporté par l’un des états les plus riches de la planète a de quoi poser quelques problèmes aux opérateurs déjà établis, d’autant plus que ces derniers ont également des velléités de croissance non dissimulées.
Les échéances sont rapides. D’ici 5 ans un nouveau paysage sera opérationnel.
On peut aisément imaginer qu’Emirates Airlines tout comme Qatar Airways n’auront aucune envie de perdre leur leadership actuel. Celui-ci s’exerce non seulement dans le Golfe mais dans le monde entier.
En termes de passagers/kilomètres transportés, Emirates Airlines est de loin de premier
transporteur international, il faut dire que la compagnie de Dubaï n’a aucun marché domestique.
Qatar Airways lutte pour faire sa place, la compagnie vise la première, mais ce n’est pas gagné. Alors l’arrivée d’un Riyadh Air puissant va encore exacerber la concurrence surtout si cette dernière accepte de l’alcool à bord, ce qui est un critère essentiel pour accueillir une clientèle internationale.
Après tout, il est possible que sous l’influence de son nouveau dirigeant Mohammed ben Salmane, ce pays copie la politique de ses voisins en matière de consommation d’alcool.
Si on compte bien, en 2030 le Golfe possèdera 5 transporteurs de premier rang : Emirates, Qatar
Airways, Etihad Airways, Saudi Arabian Airways et Riyadh Air, tous largement supportés par leurs états respectifs qui leur mettront à disposition toutes les installations aéroportuaires dont ils auront besoin et sans qu’ils soient bridés par une écologie répressive, comme ce sera le cas pour les compagnies occidentales.
La force de frappe de ces opérateurs sera considérable. En comptant les appareils actuels plus les commandes, on arrive à un total de 577 Airbus et 641 Boeings soit plus de 1200 appareils d’une capacité moyenne de 250 passagers.
Voilà de quoi déstabiliser le transport aérien international.
Car deux scénarios peuvent être envisagés.
Le premier consiste à imaginer une concurrence
acharnée entre des compagnies qui devront bien remplir leurs appareils.
Elles ne peuvent aller chercher les clients qu’en dehors du Golfe Persique car la majeure partie des passagers « domestiques » de cette région utiliseront les services des puissants « low costs » que sont Air Arabia ou Fly Dubaï pour n’en citer que deux.
Alors il est très envisageable que les grands opérateurs baissent leurs tarifs pour alimenter leurs flottes.
On voit mal comment alors les compagnies traditionnelles occidentales puissent suivre une telle stratégie.
Elles seront condamnées à perdre des parts de marché.
L’autre hypothèse est que, finalement les transporteurs du Golfe s’entendent entre eux pour garder un niveau tarifaire cohérent et qu’ils portent leur attention et leurs investissements sur l’amélioration de la qualité de service et la facilité des transits dans leurs aéroports largement modernisés.
Dans les deux cas, les compagnies occidentales ont un vrai souci à se faire.
Jean-Louis Baroux
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1 commentaire pour “Cent milliards pour le nouvel acteur du transport aérien dans le Golfe”
Les compagnies du golfe ont tendance à se copier au niveau marketing et commercial. Emirates sert de référence (principe du hub à 3 plages horaires, produits haut de gamme, intense marketing sportif et un benchmark tarifaire). L’équipe dirigeante opérationnelle de Riadh Air vient pour beaucoup de chez Qatar Airways et il est probable que les memes recettes soient appliquées chez RX. Un pré requis comme l’a signalé Jean-Louis sera le service d’alcool à bord, ce qui permettrait à la compagnie d’être à des standards internationaux. Il est important de souligner que l’Arabie Saoudite est le seul vrai marché interieur de la région avec 37 millions d’habitants et plus de 58000 millionnaires. Cette classe aisée voyage beaucoup, souvent, en famille- en première et classe affaire sur Emirates ou Qatar Airways et représente une part significative de leur revenu à forte valeur ajoutée, part qui risque de disparaitre au profit de Riadh Air qui annonce un produit disruptif et direct. D’après moi, un des enjeux principaux des prochaines années portera sur cette clientèle. La guerre n’a pas encore commencé mais les stratégies doivent déjà se mettre en place…