Certes, on n’arrête pas le progrès ! Ce n’est pourtant pas une raison, ni une excuse pour que le dit progrès puisse prendre une forme peu esthétique par rapport à son environnement.
[1]Je veux parler de la première sortie pour une série d’essais en mer de ce que l’on nous présente comme le plus grand paquebot du monde long de 362 mètres avec ses 16 ponts et d’une hauteur équivalente à un immeuble de 30 étages lequel pourra accueillir plus de 8 000 personnes soit l’équivalent d’une petite ville (bonjour les contrôles de sécurité aux escales méditerranéennes !) et dont le seul nom, Harmony of the Seas, me semble aux antipodes de la mer dont nous faisait rêver des poètes comme José Maria de Hèrèdia ou Baudelaire. Bref.
Quant à son fameux « Silence » il me semble préférable de l’oublier dans les grands fonds d’un modernisme absolu !
Bien entendu, si Royal Caribbean, l’armateur de ce navire, à décidé de construire ce nouveau monstre des mers, c’est qu’il répond à une demande en forte progression de ce nouveau style de vacances.
Et peu lui importe d’ailleurs que son nouveau paquebot se voit qualifier d’HLM flottant dans une ambiance « fête des voisins » ou encore de porte-conteneur voire même (actualité oblige), de bateaux pour migrants !
Reste toutefois que plus on se complais dans le gigantesque maritime, plus le terme de « croisière » va apparaître inadapté à cette nouvelle formule de vacances dans laquelle « la mer sans fin » d’Hèrèdia arrive à son terme.
Quelle ressemblance, en effet, entre une croisière traditionnelle sur un bateau type Ponant ou de la grande classe du Queen Elizabeth par exemple, en comparaison avec celle de l’Harmony of the Seas avec ses 2.747 cabines, ses 16 ponts, ses 26 restaurants dont une table gastronomique, des simulateurs de surf, une escape room, une tyrolienne, des murs d’escalade, une patinoire, un théâtre, un casino et un toboggan proposant 45 mètres de descente à pic à l’arrière du bateau !
Il conviendrait peut-être, que l’on invente un nom beaucoup plus approprié à ce qui ressemble en réalité à une nouvelle formule de vacances dans laquelle la mer n’apparaît au fond que comme un accessoire secondaire, à l’image du sable dans le balnéaire ou de la neige pour les stations de sport d’hiver.
Vous me direz, et vous aurez raison, que la profession est confrontée aujourd’hui à des problèmes autrement plus importants que celui de trouver un nom spécifique et compatible à l’offre que nous propose désormais cet Harmony dont l’apparition sur le marché ne semble au passage ne point rencontrer, du moins pour l’instant, un accueil correspondant à son appellation.
Mais finalement je ne me fais nulle illusion. Dans cette querelle navale, mon opinion sur cette absence d’élégance harmonieuse ressemblera plutôt au jet d’une bouteille à la mer.
Et cela, alors que l’on nous annonce l’arrivée de la copie conforme du Titanic en 2018…
Nous vivons une époque surprenante par sa démesure.
Pourquoi vous tapotez vous la tempe ?
Pierre Doulcet
Et comme toujours : pdoulcet@me.com