Cela va être la grande affaire de la rentrée. Les grandes lignes sont tracées. Un nouvel ensemble régional va être créé à partir des compagnies filiales à un degré quelconque d’Air France. Le dirigeant est connu et disons-le, il fait l’unanimité, c’est Lionel Guérin. Pour autant la partie ne va pas être facile.
De quoi s’agit-il ?
Il faut regrouper sous une seule entité l’exploitation de 3 ou 4 compagnies : Régional, Britair et Airlinair, la position de Transavia dans cet ensemble est encore floue, lesquelles sont toutes actuellement sous le parapluie de la compagnie nationale. Mais l’affaire est diablement complexe. En effet chaque transporteur concerné opère des appareils non seulement différents, mais qui proviennent de constructeurs en compétition. De plus il existe de fortes disparités dans les conventions collectives qui s’appliquent dans chacune de ces compagnies et les personnels des uns et des autres veulent bien bénéficier d’avantages consentis à d’autres transporteurs, mais aucun ne tient à abandonner les siens. Sauf que si chacun obtient plus, cet ensemble qui perd actuellement aux alentours de 100 millions d’euros par an, ne sera simplement pas viable.
Comment résoudre la quadrature du cercle ?
La piste actuellement envisagée consiste à garder les compagnies séparées et les transformer en sociétés de production de sièges, lesquels seront achetés et commercialisés sous le label d’une nouvelle société, qui ne sera pas Air France. Voilà qui est diablement compliqué. Certes ce dispositif préserve comme on dit les « avantages acquis » par les uns et les autres, et il évite les dérives vers le haut, par contre il ne résout pas la baisse significative des coûts qu’il faudra tout de même bien réaliser pour rendre l’ensemble rentable. Pour le moment l’affaire ne paraît pas trop mal engagée puisque la déflagration sociale n’a pas eu lieu. Seuls les pilotes de Régional se sont mis en grève et encore pour une période limitée.
Reste à savoir quelle position va adopter Air France ? Plusieurs scénarios peuvent être envisagés. D’abord tout simplement, Air France laisse la nouvelle entité se débrouiller par elle-même sans intervenir en rien dans sa gestion. Cela paraît un peu improbable d’autant plus que la compagnie va détenir pour encore pas mal de temps une part très importante du capital, sinon la majorité. Et puis ce n’est pas l’habitude du transporteur national de ne pas garder un contrôle serré sur ce qu’il estime être son champ naturel d’activité. Alors il faudra sans doute tout l’entregent de Lionel Guérin pour négocier habilement entre les nécessités du marché et de l’exploitation et les désidératas d’Air France. Par chance, les relations entre Lionel Guérin et Alexandre de Juniac sont pour le moment excellentes et il n’y a pas de raison pour que cela ne dure pas.
Reste le cas de Transavia. La compagnie devrait être dotée dans le futur d’une flotte portée à 20 appareils, soit plus du double que ce dont elle dispose pour le moment. Pourquoi faire ? Rien n’est clair tout au moins dans les annonces qui ont été faites. Ou bien il s’agit de recréer un Air Inter bis et dans ce cas il est probable que les personnels d’Air France vont sérieusement ruer dans les brancards, soit il s’agit de renforcer la capacité de la compagnie sur son réseau international actuel et alors on entendra certainement des cris d’orfraie de la part des transporteurs aériens français concurrents qui ne supportent déjà pas sa présence.
Voilà des sujets qui ne vont pas manquer d’occuper sérieusement non seulement les dirigeants concernés, mais également les syndicats. Rien ne se fera sans eux. Comment vont-ils se comporter, là est la grande question. Avec leur neutralité bienveillante si ce n’est leur complicité active, tout est possible, sinon rien ne pourra se faire.
Il reste très peu de temps. La nouvelle compagnie doit démarrer en tout début d’année prochaine, au plus tard au 01 avril 2013. Le chantier est immense. Il y va de l’avenir du transport domestique français, pour le moins.
Jean-Louis Baroux