Le PDG de Boeing penaud devant le Congrès américain
4 novembre 2019 Frédéric De Poligny Aucun commentaire People Boeing, Dennis Muilenburg, Etats Unis, système MCAS 2906 vues
Mardi et mercredi dernier, 29 et 30 octobre, Dennis Muilenburg, le PDG de Boeing était convoqué devant la Commission des Transports du Congrès des États Unis pour s’expliquer sur les causes et les suites des terribles crashs des deux Boeing 737 Max. Et le moins qu’on puisse dire c’est que les membres du Congrès ne l’ont pas ménagé. Une des moins virulentes, Debbie Mucarsel-Powell (élue de Floride) lui disant « Si vous aviez eu la moindre once de crédibilité, vous auriez su que la seule chose à faire est de démissionner« .
Tout au long de la première journée, Dennis Muilenburg particulièrement ému, a présenté ses excuses pour les drames dont officiellement et pour la première fois, Boeing reconnait une vraie responsabilité, un changement important par rapport à la position de la compagnie qui au début rejetait les fautes sur les pilotes des appareils.
Mais malgré ces déclarations, les membres du Congrès l’ont attaqué sur les pratiques managériales de Boeing, sur les demis mensonges ou les demies vérités qui ponctuaient son témoignage.
Pour la Sénatrice Tammy Duckworth « Vous nous avez dit des demies vérités encore et encore. Vous ne nous avez pas tout dit! »
Pour le Sénateur John Tester, Boeing a surtout cherché à faire des économies ajoutant que personnellement il préférerait marcher plutôt que de remonter à bord d’un 737 Max.
Mais les choses se sont corsés quand Dennis Muilenurg a du reconnaître ce que tout le monde savait déjà depuis quelques jours, c’est qu’il avait été informé des critiques émises par les pilotes d’essai sur les problèmes engendrés par le système MCAS à l’origine des deux crashs.
Mais surtout il a dû avouer que ces documents mettant en cause la sécurité des 737 Max lui avait été communiqués après le premier accident, mais bien avant le deuxième crash.
Les membres de la commission lui ont alors demandé des explications sur son absence de réaction et voulaient savoir pourquoi il n’avait pas prévenu les autorités fédérales et en tout premier lieu la FAA en charge des contrôles et des autorisations de vol aux Etats Unis. Là, les question se firent plus incisives.
La deuxième journée de témoignage de Dennis Muilenburg fut beaucoup plus rude. Pour la Commission du Congrès il semblait évident que Boeing avait tout fait pour rentabiliser au maximum la nouvelle série des 737, les Max, en passant outre devant des problèmes qui pour certains tenaient de la sécurité des avions.
Chaque fois que la question de sa démission lui était posée, Dennis Muilenburg répondait qu’il se sentait « responsable de faire passer à Boeing le cap de cette crise du 737 Max » et qu’en conséquence il se refusait à démissionner.
L’élu du Tennessee Steve Cohen lui a demandé « Qu’est ce que le mot responsabilité veut dire? Allez-vous diminuer votre salaire? Allez-vous travailler à partir de maintenant gracieusement pour régler ce problème? Ces gens ne reviendront pas, ils sont partis pour toujours. Mais votre salaire est toujours là, lui. »
Mais l’attaque la plus rude est venue de Jesus Garcia, élu de l’Illinois accusant directement Denis Muilenburg d’avoir fait passer le profit avant la sécurité.
« Vous avez contourné sans arrêt les exigences de la certification, vos employés ont même reconnu avoir menti à la FAA (l’organisme de la certification). Il y a deux explications possibles. Ou vous n’avez pas vraiment réalisé que vous aviez un avion défectueux, ce qui démontre une très grave incompétence et/ou une totale négligence. Ou bien vous saviez que vous aviez un avion défectueux mais vous l’avez quand même lancé sur le marché. Dans ce cas il ne s’agit que de pure corruption« .
En rappelant que Denis Muilenburg est toujours le capitaine du bateau, Jesus Garcia précise qu’une telle culture de négligence, d’incompétence ou même de corruption commence toujours en haut de l’édifice, et que ce haut n’est autre que Dennis Muilenburg,
Il accuse ce dernier de n’avoir choisi que l’option lui permettant de gonfler ses propres revenus et lui suggère qu’il est temps de démissionner. Ce que l’intéressé se refuse à faire.
Mais beaucoup d’observateurs laissent entendre que son départ à court terme est hautement prévisible, car en plus des innombrables procès au civil, Boeing maintenant risque de faire l’objet d’accusations criminelles.
D’autres moins féroces soulignent quand même que l’homme qui était aux commandes lors de ces événements tragiques, n’est peut-être pas la meilleure personne pour réparer les erreurs commises et pour remettre Boeing sur ses rails.
Frédéric de Poligny
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