Le président du Directoire de Selectour peut-il tout dire ? par JL Dufrenne
11 décembre 2019 Jean-luc Dufrenne 3 commentaires Distribution France, Havas, Laurent Abitbol, selectour 4472 vues
La récente actualité avait naturellement occulté celle des autres acteurs incontournables de la distribution du tourisme en France et notamment Selectour. Si son Président se concentrait sur l’offre de reprise groupée de Thomas Cook, dont je salue encore ici la pertinence, il ne pouvait, en même temps, communiquer sur le réseau dont il assure la présidence du Directoire. Le congrès annuel à Jérusalem lui a permis de remettre sous les feux de la rampe le premier réseau volontaire de France avec son lot d’annonces fausses ou inappropriées. Sauf que, pour ce qui me concerne, un Président du Directoire de coopérative « ne devrait pas dire çà » voire même « ne peut pas dire ça ».
Je suis d’ailleurs surpris qu’aucune voix ne s’élève contre ce type de propos. Avant d’analyser les raisons de cet inquiétant silence, je vais détailler ci-dessous quelques exemples :
– Le Président du Directoire dit qu’il a rendu la quasi-totalité des agences Selectour plus riches.
Quand bien même il existerait au sein des services comptables du réseau un outil permettant l’analyse consolidée de tous les bilans des adhérents ; ce dont je doute, la coopérative ne dispose d’aucun outil permettant d’analyser la part contributive du réseau dans le résultat net de la dite entreprise.
Il faut quand même ici rappeler que chaque entreprise adhérente au réseau est totalement indépendante et que les profits potentiels générés par la coopérative ne peuvent que concerner une part très minoritaire de son résultat et quand bien même, les données bilantielles ne peuvent les isoler.
En se basant sur un autre calcul, inspiré des chiffres « record » en tourisme communiqués récemment, on peut estimer que la moyenne de ventes tourisme centralisées par le réseau est de 400 000 euro par point de vente.
Si, grâce aux nouvelles négociations, la marge avait même progressé sur l’ensemble d’1,5 % , le gain supplémentaire serait de 6 000 € par point de vente. Ce montant est loin d’être négligeable mais ne peut en aucun cas venir foncièrement changer le résultat de l’entreprise.
Si celles-ci sont performantes, elles le doivent pour partie aux négociations du réseau et pour une autre partie (sans doute bien plus conséquente) à
la bonne gestion de leur dirigeant qui n’est pas le président de la Coopérative.
Laurent Abitbol peut légitimement annoncer les résultats des sociétés du groupe Marietton ; il n’est pas en mesure de le faire néanmoins pour chacune des agences Selectour dont il est complètement extérieur.
– Le Président avait affirmé que beaucoup d’agences étaient des « taudis » et qu’elles sont devenues aujourd’hui toutes très belles grâce à son intervention ;
Même si on peut collectivement le déplorer, le Président du Directoire dit ici une grosse bêtise car la très grande majorité des agences de voyages du réseau n’a subi aucune transformation ou réaménagement depuis plusieurs années ;
Dit autrement, si les agences étaient agréablement aménagées en 2017, elles le sont toujours aujourd’hui. Quant aux autres, elles sont toujours… d’un autre temps : rien n’a changé !
– Le Président du Directoire affirme que les agences de voyages ne savent pas vendre de vols secs ; il dit même « ils sont nuls » (on ne pourra guère attendre de sa part de la mesure).
Ceci, une fois encore, est complètement faux. Tout conseiller voyage sait vendre, avec une facilité déconcertante, les vols secs et les agrégateurs de qualité présents sur le marché leur facilitent grandement le travail.
Le Président fait probablement ici une confusion entre le peu de demandes en agences et le fait de ne pas savoir les vendre.
La vente de vols secs, si tant est qu’on arrive à me prouver la pertinence de vendre encore ce type de produits par des conseillers-voyages, ne pourra prendre un véritable essor qu’accompagnée d’une phénoménale campagne de e-communication.
On pourra investir encore dans un nouvel outil performant très coûteux mais il faut y associer un plan de communication extrêmement ambitieux également.
Lorsqu’on connait les marges contraintes du vol sec, on peut raisonnablement se poser la question d’un tel investissement.
Je viens de citer ces 3 exemples mais il y en, hélas, bien d’autres qui devraient susciter dans les rangs des coopérateurs, des Elus ou même de la Presse Pro une vague de critiques ou a minima de réactions mais rien, nada, queutchi !
Pour ce qui me concerne, ceci est inquiétant et pourrait, à terme, remettre en cause les fondements de la coopérative.
Si je suis le seul à ne pas me reconnaître dans les propos que tient celui qui a été élu , je m’inclinerai mais je le pense pas.
Je n’ai aucune velléité à mener une fronde contre un Président du Directoire qui, par ailleurs, a démontré que, grâce à une équipe d’experts et d’investisseurs qui l’entourent, il avait su faire remarquablement faire évoluer le groupe qu’il dirige. Mais il s’agit ici de tout autre chose : la coopérative.
Pas à pas, le mélange des genres commence à faire son chemin et pourrait, à terme, menacer l’existence même de la coopérative.
Quand Laurent Abitbol additionne les chiffres de la coopérative et ceux du réseau Havas : ça ne veut rien dire.
Quand le même Président affirme qu’il a contribué aux bilans positifs des adhérents Selectour, c’est une autre bêtise……et elles sont pléthores.
En dehors du GIE ASHA, qui a pour fonction essentielle et consolider et optimiser les achats de deux entités fondamentalement différentes, rien ne lie une agence Havas à une agence Selectour.
Ce discours visant à associer en permanence Havas et Selectour présente un réel danger pour les coopérateurs que nous sommes ; Notre marque, que chaque adhérent contribue à valoriser au quotidien, va se fondre dans un agglomérat ou, peu à peu, nous perdrons de notre identité donc de sa valeur.
Je crains les résultats d’une nouvelle enquête de notoriété sur la marque Selectour. L’absence de projet ambitieux de campagne de communication vient hélas amplifier cette thèse.
Quant à la clé de répartition des coûts du GIE ASHA, elle pourrait probablement faire l’objet d’une analyse plus poussée. Une mauvaise intuition me fait croire qu’elle n’est pas à l’avantage de notre réseau. Alors, pourquoi personne ne réagit : là est la question !
Côté coopérateurs :
Une grande majorité ne s’exprime pas parce que c’est le cadet de leurs soucis. Ils ont une entreprise à faire fonctionner et, quoiqu’en dise le Président de la coopérative à laquelle ils adhérent, ce n’est pas ce dernier qui contribue à la rentabilité de leur boite !
Pour la plupart, ils sont cependant convaincus que la stratégie gagnante qu’adopte le Président du Directoire pour son groupe s’applique aussi pour la Coopérative.
Pour eux, il n’y a pas véritablement d’enjeu et si les ingrédients du succès nécessitent que le Président s’affiche entre Enrico et Chantal (Goya), qu’il le fasse , tant que leurs commissions sont préservées.
Côté élus :
Il fallait s’en douter : le Conseil d’Administration est devenu une simple chambre d’enregistrement et plus aucune décision ne s’y prend. On me dit cependant que certains administrateurs tentent de s’opposer aux décisions déjà décidées avant conseil mais que rien n’y fait.
On ne peut pas avancer en discutant parait-il ? je persiste et signe : on ne préside pas une coopérative comme on dirige une entreprise.
Le dirigeant d’une entreprise a une totale liberté de parole quant à la communication de son entreprise (cela dépendant néanmoins de sa gouvernance).
Le Président de Coopérative doit, a contrario, ne s’exprimer qu’au travers du mandat que lui ont confié les adhérents au travers des administrateurs.
Exprimé différemment, chaque adhérent devrait se retrouver dans les propos que tient leur représentant.
Côté presse professionnelle :
– Le Président du Directoire est un « bon client » dans tous les sens du terme !
Il devient incontournable et fait rire avec ses annonces, souvent abracadabrantesques, qui font exploser les clics. Pourquoi s’en priverait on ? Il est aussi un bon client-annonceur (avec la pub Voyamar) qu’il convient de ménager et cela s’entend aussi.
La Quotidienne m’offre la possibilité, et je l’en remercie, de faire entendre une voix discordante. Chacun devrait se féliciter de cette posture démocratique et il me semble que les colonnes de La Quotidienne sont ouvertes à tous.
A ceux qui pourraient me reprocher de ne pas m’adresser directement au président du Directoire et dans la sphère du réseau, je précise que je l’ai déjà fait, pour d’autres « propos erronés » qu’il avait tenu lors de réunions du réseau.
Il n’a pas eu l’air d’en tenir compte car il récidive, par voie de presse, et donc sur la place publique.
Et je tiens donc naturellement à rappeler, sur la place publique moi aussi, que ce que dit le Président du Directoire de Selectour n’est pas en phase avec la pensée d’un nombre non négligeable d’ adhérents à la coopérative.
Chaque nouvelle rencontre me conforte dans cette analyse.
A bientôt.
Bien à vous.
Jean-Luc Dufrenne
Gérant Selectour Génération Voyages. Président Entreprises du Voyage Hauts de France/Normandie. Administrateur APST.
Sur le même sujet
Nouveau : des cartes cadeaux voyages avec Selectour
Selectour, le premier réseau d’agences de voyages, vient d’annoncer le lancement de ses cartes...
Manor à Cannes : un congrès majestueux
Encore un indéniable succès pour le 29ème congrès du réseau Manor à Cannes qui...
Les Réceptifs Leaders repartent en tournée
Pour les conseillers en voyages c’est un rendez-vous unique avec les leaders du voyage...
3 commentaires pour “Le président du Directoire de Selectour peut-il tout dire ? par JL Dufrenne”
Bonjour Jean Luc
Je viens de lire attentivement ton exposé. Si ton analyse peut, par certains points se comprendre à travers le regard d’un patron d’agence, il n’en reste pas moins que le Président du Directoire a permis, ces dernières années, à la distribution au sens large du terme, de consolider et de conforter sa position dans le paysage national de l’industrie du tourisme. Et ce n’est pas rien. Il faut en prendre la mesure et rendre à César etc….. Je serai plus interrogatif sur le poids que représente aujourd’hui le Groupe Marietton dans le réseau Selectour. En son temps, Philippe Demonchy avait créé Selectour Finance. Cette structure avait pour objectif principal de maintenir dans le réseau des agences en difficulté ou en vente et aussi d’éviter qu’un seul Adhérent ne prenne trop de poids, et donc de pouvoir, au sein du réseau. S’il est toujours bon d’avoir à la barre un Capitaine solide et entreprenant, que se passera t il lorsqu’il quittera le navire en emportant la moitié de la cargaison …?
Bravo pour cette franchise , qui dénote singulièrement de la pensée unique et flagorneuse des autres compte-rendus de presse pro .
Bravo pour cette franchise , qui dénote singulièrement de la pensée unique et flagorneuse des autres compte-rendus de presse pro .