Avec la Martinique, on est souvent abreuvé de langue de bois, de grands desseins, à coup de sensibilisation des foules, au service, à l’accueil et au tourisme comme secteur pourvoyeur d’emplois. Et puis on écoute et on relaie mollement tellement on sait que les mots viennent s’ajouter aux mots, comme partout en France.
Pourtant, cette fois, la donne a peut-être changé. Une nouvelle équipe, avec Karine Mousseau (à droite sur la photo), à la Présidence du CMT, et Joëlle Désir, à la Direction Générale, apporte sans doute la dose de sang neuf qui fallait au institutions locales du tourisme.
Ces deux femmes, qui n’ont pas l’air de s’en laisser compter si facilement, sont respectivement professeur d’économie et professionnelle affirmée de l’hôtellerie.
[1]Une professeure qui est aussi élue dans plusieurs cadres institutionnels et une Directrice Générale habituée aux fonctions dirigeantes de l’hôtellerie et de la restauration.
Un tandem à priori idéal pour un secteur majeur de l’économie insulaire, qui plus est gros pourvoyeur d’emplois pour peu qu’on en fasse vraiment une priorité ; ce que leur nomination semble annoncer, surtout quand on voit les budgets qui leur sont alloués : 15 M € qui viennent de la région et de l’Europe auxquels s’ajoutent les 12 M du CMT.
Précisons tout de suite que ces deux femmes de terrain arrivent visiblement au bon moment.
[2]En 2015, la destination progresse en nombre global de visiteurs internationaux, avec 790 000 pax tout compris, dont 80 % de francophones, soit une hausse de 11 % sur 2014.
Les 4 premiers mois de 2016 semblent confirmer la tendance en affichant une croissance de 14 % sur les mêmes mois de 2015.
La croisière également a très bien marché avec 380 000 pax, soit une hausse de 30 % « au moins » précise Mme Mousseau ; avec de nombreuses grandes compagnie en escale et Costa Croisières ou TUI en tête de ligne.
Cerise sur le gâteau, le marché domestique est aussi en croissance régulière ; rien que pour les croisières, par exemple, il pèse environ 25 % des embarquements.
Mais ce n’est pas tant ces bonnes nouvelles qui frappent quand on écoute les deux nouvelles responsables du CMT.
[3]Ce qui marque l’esprit, au premier chef, c’est leur côté autorité ferme et simple ; on y lit une détermination sans effet de manche, une volonté de travailler qui n’a pas besoin de grand mot pour se prouver.
Travail ! C’est justement le terme que ces deux femmes, dont la complicité fait plaisir à voir, emploient le plus souvent.
Pour évoquer les grandes lignes de leur politique générale, inutile d’attendre une présentation très formelle ; les détails arrivent en vrac, comme on dresse la liste des choses à faire…
Numérique, innovation, ouverture des commerces, marque « Martinique », formation, annualisation de la fréquentation, communication grand public, classification hôtelière, événementiels diversification des marchés émetteurs… les chantiers ne manquent pas.
Les points d’appui non plus visiblement, comme l’UMIH pour la formation hôtelière, ou la Chambre de Commerce pour l’apprentissage des langues…
La jeunesse semble aussi au rendez-vous, selon la Présidente et sa Directrice générale, qui multiplient les exemples d’initiatives innovantes, dans la location de voitures entre particuliers, dans l’hébergement ou dans la conciergerie, qui fleurissent et diffusent une ambiance dynamique à travers toute l’île.
[4]Tout étonnées elles-mêmes de cette profusion, elles entendent bien l’accompagner, d’autant plus que cette nouvelle vague d’entrepreneurs entraîne également une montée en gamme de l’offre touristique insulaire, en particulier dans les hébergements meublées, gîtes, maisons d’hôtes et petites unités, tantôt insolite comme le Domaine des bulles et Sphère de lunes, ou très haut de gamme, comme Suite villa et Plein soleil.
Une tendance qui permet à la Martinique, non seulement de retrouver une certaine compétitivité face aux grosses structures de la République dominicaine ou des Caraïbes en général, mais aussi d’améliorer ses marges avec des produits à plus forte valeur ajoutée qui attirent forcément une clientèle plus rentable.
Pour une fois, on ressort d’une conférence de presse Martinique en se disant que, si la situation s’améliore de fait, les nouvelles responsables ne feront pas uniquement de la représentation mais qu’elles seront les leviers actifs et fiables dont la dynamique actuelle a besoin pour s’amplifier.
D’ailleurs, elles le disent elles-mêmes : « on a encore beaucoup d’efforts à faire ».
Mmes Mousseau et Désir étaient tellement dans leur travail qu’elles en ont presqu’oublié le sempiternel refrain sur la « sensibilisation des foules »… C’est seulement au moment de se séparer des journalistes qu’elles s’en sont souvenu…
Si ça, ce n’est pas un bon signe…
Bertrand Figuier