Voilà une construction qui ressemble tout de même à une belle usine à gaz. Si on remonte aux origines, HOP a été créée le 31 mars 2013, c’est-à-dire presque 6 ans par le rapprochement commercial de 3 compagnies régionales : BritAir, Regional Airlines et Airlinair. Notons que Régional Airlines était elle-même le fruit d’une fusion entre une première version de Régional Airlines avec Flandre Air et Protéus Airlines. Mais la première Régional Airlines était elle-même constituée de la fusion entre Air Vendée et Airlec, en 1992. Bref voilà déjà une filiation compliquée.
A la suite de plusieurs difficultés de l’avion régionale française qui ont vu, entre autres, la disparition d’Air Littoral, l’une des plus importantes tout de même, Air France alors en plein développement, a mis la main sur toutes les compagnies. C’est ainsi que BritAir et Régional Airlines sont devenues filiales de la compagnie nationale en 2000.
Passons sur les motivations du grand transporteur qui aurait pu éviter cette prise de contrôle et reconnaissions qu’elle a fait les bonnes affaires des propriétaires de ces compagnies au premier rang desquels Jean Paul Dubreuil alors propriétaire de Régional Airlines laquelle se trouvait alors en grand danger.
Restait un petit transporteur indépendant : Airlinair créé et géré par Lionel Guérin. Tant bien que mal, ce dernier avait réussi à maintenir sa compagnie à flot en rapprochant son exploitation des besoins d’Air France. Tant et si bien qu’elle est entrée elle aussi dans le giron de la compagnie nationale en 2013. Il faut dire qu’à cette époque, le transport régional était devenu un vrai boulet pour la compagnie nationale.
Jean Cyril Spinetta a demandé alors à Lionel Guérin de mettre un peu d’ordre dans tout cela et de faire en sorte que les pertes soient limitées à défaut de rendre l’ensemble profitable.
Seulement Lionel Guérin s’est heurté à la maladie endémique française, la difficulté d’un dialogue social efficace. Pour réaliser ce qui aurait dû être une fusion de ces compagnies, il aurait fallu unifier les conditions d’emploi. Oui, mais au fil du temps, chaque société avait eu sa propre manière de gérer ses employés et par conséquent chacune avait ses avantages et ses inconvénients.
Si on voulait diminuer les coûts, il ne fallait pas d’abord commencer par les augmenter ce qui aurait été l’inéluctable conséquence d’une fusion des effectifs chacun voulant garder ses propres privilèges et si possible bénéficier de ceux des autres. Voilà pourquoi la fusion est devenue impossible.
Alors pour réaliser un semblant d’unité, on a créé une quatrième société. Suivez-moi bien. On met sur le marché une marque HOP mais celle-ci doit être une véritable entité économique. On en fait donc une société. Seulement elle commercialise des vols sans être une véritable compagnie aérienne car l’exploitation est réalisée par les trois filiales que sont Airlinair, BritAir et Régional, lesquelles vendent leurs heures de vol à HOP qui les commercialise sous le code d’Airlinair A5. Seulement A5 n’est pas enregistré au BSP français et les billets sont donc distribués sous le code d’Air France AF/057.
Bien entendu chaque compagnie dispose de sa propre flotte avec des constructeurs différents : Bombardier pour BritAir, Embraer pour Régional et ATR pour Airlinair. Au total 7 types d’appareils différents sans compter les sous-types, le tout pour 76 avions.
Et ce n’est pas tout. Lors d’une dernière réorganisation d’Air France, les vols opérés par la compagnie nationale à Orly reviennent dans le système HOP qui les distribue avec Air France. Allez y comprendre quelque chose ! C’est ainsi que sur un vol Paris Nice, par exemple, on peut entendre l’annonce suivante « Bienvenue sur le vol La Navette HOP Air France opéré par Air France/KLM membre de l’alliance Skyteam !… » Les nombreux clients de ces vols ne me démentiront pas.
Lorsque Ben Smith parle de simplification on peut imaginer qu’il va avoir un certain travail avec ce qui ne représente tout de même qu’une division très minoritaire du groupe Air France/KLM.
Seulement la partie ne sera pas facile. On a déjà vu que les accords signés par le SNPL d’Air France n’étaient pas acceptés par les syndicats des filiales régionales, car, et c’est encore une difficulté supplémentaire, chaque compagnie a gardé sa propre représentation sociale.
Alors que faire de HOP ? Je ne suis heureusement pas à la tête du groupe car je ne voudrais pas être confronté à la nécessite de trouver une solution, d’autant plus que le transport régional d’Air France perd de l’argent là où les concurrents étrangers EasyJet ou Volotea en gagnent. Comment transformer un foyer de pertes endémique en un centre de profit ? Voilà toute la question et bien malin qui pourra y répondre.
Jean Louis Baroux