Voilà, nous sommes fixés sur les orientations que Jean Marc Janaillac veut imprimer à au groupe Air France/KLM. D’abord le constat est clair : si la compagnie ne bouge pas, la catastrophe n’est pas loin.
Les responsables ont pris la mesure et de l’énorme dossier social, en clair les personnels ne croient plus à ce que leur dit la direction et ne sont pas prêts à faire les efforts nécessaires aussi bien pour ce qui concerne la productivité que la qualité de service. Ils ont également mesuré l’écart qui les sépare de leurs concurrents les plus dangereux : dans le bas de gamme les « low costs », y compris maintenant sur le long courrier alors que les dirigeants ont pendant très longtemps jugé ce secteur d’activité hors d’atteinte des compagnies à bas coûts, et dans le haut de gamme car l’offre des compagnies du Golfe en particulier est de plus en plus supérieure à celle du Groupe Air France/KLM.
[1]Problème supplémentaire les ressources financières manquent pour faire les investissements nécessaires sur les nouveaux appareils et la mise au standard des avions anciens.
Bref, le constat est là. Première question, sera-t- il partagé par le personnel de l’entreprise ? A l’évidence les discussions avec les syndicats seront très difficiles car ces derniers mettront en avant les bénéfices engrangés en 2015, même si ceux-ci sont très modestes et même si les comptes au 30 septembre 2016 montrent plutôt une nette dégradation.
Comment faire adhérer à une nécessité d’efforts à ceux qui ont été choyés pendant des années et qui font leur métier par pure routine, sans aucune empathie pour leurs clients ? C’est le premier défi auquel la nouvelle direction devra s’affronter. L’affaire sera d’autant plus compliquée que JMJ a pris toutes les fonctions de direction et que, par conséquent, il se trouvera en première ligne pour les discussions sans avoir de capacité de recul.
Allez, je prends un pari : je pense que les consignes du Gouvernement, même si elles ne sont pas écrites, sont d’éviter tout conflit social avant les élections. En foi de quoi, il serait surprenant qu’un plan d’amélioration de la productivité soit signé entre les partenaires avant les prochaines élections législatives.
[2]Le plan Trust Together couvre néanmoins la plupart des secteurs d’activité y compris le cargo qui est pour le moment très malade. Mais les mesures proposées paraissent bien tièdes au regard à la fois de la situation actuelle, mais aussi à l’environnement concurrentiel.
N’oublions pas que Norwegian, French Blue et sans doute Air Asia X vont déferler sur le long courrier et que ces transporteurs attaqueront les lignes les plus importantes, partout où ils pourront décrocher les droits de trafic.
[3]Certes l’approfondissement des Alliances peut avoir un effet, certes améliorer la performance des « hubs » de Roissy et d’Amsterdam ne peut pas être négatif, mais ce sont des mesures à la marge en comparaison de l’objectif de rendre les organisations plus efficaces, ou de celui l’enrichir la relation avec le client, voire même de développer les marchés point à point.
La création d’une nouvelle compagnie pour le moment appelée Boost est annoncée. Mais son positionnement n’est pas clairement défini. Si son objectif est de reconquérir les dessertes qui ont dû être abandonnées à la concurrence, que ce soit des lignes courts ou long-courriers, cela est peu compatible avec l’utilisation des pilotes venant de la compagnie-mère. L’exemple de Transavia France est là pour montrer la difficulté de l’exercice.
[4]Faut-il rappeler que le transporteur « low cost » filiale d’Air France, n’a jamais gagné d’argent ? Et puis une nouvelle compagnie, au sein d’un ensemble qui en comporte déjà 6 : Air France, KLM, Transavia Hollande, Transavia France, Hop Air France, Martinair, le tout abrité sous le même toit social avec des contraintes d’emploi presqu’identiques, cela ne devrait pas faciliter la fluidité des relations entre les transporteurs du groupe.
La tactique qui consiste à faire discuter les représentants du personnel avec le Boston Consulting Group, le cabinet conseil choisi pour accompagner l’opération, est sans doute habile et pour tout dire, c’est probablement la seule possible.
Reste à espérer qu’il n’y aura pas de nouveau conflit social et que la dégradation de la recette unitaire va s’arrêter.
Après tout, Jean Marc Janaillac a peut-être de la chance et c’est la première qualité que Napoléon attendait de ses généraux.
Jean-Louis Baroux