Le voyage est un métier encore jeune. L’enfance fut insouciante, car le voyage, le tourisme au sens large, était un marqueur valorisant de réussite sociale, il se développait vite. Tous les voyants étaient au vert. Les vendeurs ne rêvaient pas, ils vivaient avec leurs clients le développement d’une activité festive, ludique et même un peu bling-bling.
Après s’être imaginées hôtesses de l’air, toutes les jeunes filles rêvaient, au début des années 80, de devenir vendeuses de voyages. Certaines le furent.
C’était l’époque du ciel bleu, du sable blanc, de la mer turquoise et du soleil brûlant. Serge Gainsbourg en fit même une chanson à succès. C’était le bon vieux temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître.
Puis des nuages de plus en plus sombres vinrent perturber cette image idyllique : les attentats palestiniens, les guerres du Golfe, les crises économiques. Des épidémies, déjà. Autant de crises d’adolescence. Progressivement, les voyageurs devenaient de plus en plus frileux, à la recherche de sécurité, reconnues par les nombreuses lois qui encadrent la profession. Frilosité qui frappe même les participants des voyages d’aventure. Imperturbables, les professionnels restaient fidèles à une image qui valorisait leur activité. Mais, le rêve n’était plus ce qu’il était.
D’autres générations vendeurs et voyageurs arrivaient aux affaires. Plus «techniques», révolution numérique oblige. Donc moins utopiques, moins avides de partager leur passion du voyage. La fin de l’insouciance. Le voyage rentrait dans «le dur.»
L’idée-force était de vendre, toujours plus, mais pas forcément mieux. Et surtout moins cher. La productivité devint la norme à respecter. Le volume était le maître-mot du mass market, plus la qualité.
L’après-vente fut totalement négligée, personne ne voulait vraiment écouter les consommateurs.
Beaucoup pensaient qu’il suffisait de proposer des nouveaux produits pour les vendre.
D’autres, tendance gourous du marketing et du merchandising, pensaient les connaitre au travers de statistiques et de techniques dont les noms se terminent immanquablement en «ing».
Ce hiatus constatait la scission entre les agents de voyages et leurs clients. Alors, le consommateur devenait son propre agent de voyages, il a assimilé les rudiments du Code du tourisme au point de battre sur leur propre terrain des professionnels qui acceptent de facto le rôle de distributeurs de brochures et de preneurs d’acomptes, de porteur de garanties qui rassurent les voyageurs les plus frileux. Souvent les plus âgés.
Pauvre voyage, il ne méritait pas le rôle de faire-valoir.
Les conséquences de la pandémie de coronavirus permettront, je l’espère, une prise de conscience de l’importance de la prise en compte de l’après-vente par les vendeurs, hélas non formés à cet exercice toujours périlleux.
Complétant la situation traumatisante de la cessation brutale d’activité de Thomas Cook et celle qui est à venir, partielle, mais importante de TUI France.
Vendeurs écoutez ce que vos clients vous disent sur leurs besoins, leurs envies.
Un indispensable préalable pour continuer à évoluer dans le monde anxiolytique de la vente de forfaits touristiques.
Les besoins sont immenses et négligés : formation des vendeurs aux techniques du traitement des réclamations, rédaction de conditions particulières de vente adaptées aux nouvelles donnes d’un monde touristique qui change au jour le jour.
La survie à moyen terme de la profession en dépend. Faire en sorte que l’humain, l’écoute soit au centre de vos préoccupations professionnelles.
François Teyssier